17 JOURS POUR 6 TONNES DE LIVRES


"Dis donc, tu nous ferais pas un super petit article comme la dernière fois sur la récolte et le traitement de nos 6 tonnes de livres ?" MCZ. Réponse de LHT "Oh si je peux ! mais il risque d'être un peu plus long que la dernière fois !"
Par où je commence et surtout comment faire pour restituer le côté, il y a 200 cartons à envoyer à Cotonou, 50 à récupérer à Paris, 150 à envoyer du département du 75 au département du 61 (qui se trouve dans la région du Perche), reconditionner, scotcher, déscotcher, peser, mesurer, trier, préparer la liste de colisage pour le transitaire (Necotrans il s’appelle) avant le 05 juillet en arrivant à Paris le 1er, trouver un déménageur (bretons de préférence) début juillet, qui est la période rouge des déménagements donc peu de dates disponibles, et ne pas se transformer en carton soi-même ! Au final et si mes calculs sont bons prés de 6 000 kg, soit 6 tonnes de livres que nous envoyons vers Cotonou depuis Paris pour la prochaine Mini-Bibliothèque et pour le renouvellement du fonds de celles d’Akpakpa et de Gbegamey.
J’aurais pu faire sous forme de recette mais trop classique et trop galvaudé. Sous forme de mode d’emploi, nous ne sommes pas IKEA. Sous forme de compte-rendu, trop formel. Si j’avais été illustratrice / dessinatrice / Bdéiste, j’aurai probablement fait une super BD ou roman graphique, mais ce n’est pas le cas. Donc l’écriture. Et comme tout ça est un peu fastidieux pour qui ne l’a pas vécu (moi je me suis bien amusée !), j’ai décidé de vous livrer cette aventure sur un ton léger, drôle (j’espère) et comme j’aurais aimé le lire.
Pour mettre en place une stratégie, il faut définir l’objectif. L’objectif était certes de récolter le plus de livres possibles, neufs ou en bon état, mais surtout que nous puissions offrir aux lecteurs une grande variété d’ouvrages (romans, BD, livres d’arts, albums jeunesse…), en essayant de nouer des partenariats durables avec des structures sensibles à notre action.
Notre directrice des partenariats, Céline, s’est donc mise au travail et ça a marché. Beaucoup de structures françaises ; musées, libraires, maison d’édition, particuliers, galeries, ont joué le jeu et nous ont fait don de plusieurs dizaines de cartons de livres en tous genres.
Passée cette première étape du travail et le nombre de partenaires augmentant de jour en jour (et donc de cartons de livres mis à notre disposition), nous avons réalisé que les livres n’ayant pas de jambes, il fallait maintenant les faire arriver jusqu’à nous. C’est donc là que j’interviens et que je me transforme en déménageuse / logisticienne du transport international. Je saute dans l’avion direction Roissy Charles de Gaulle, terminal 2 E (oui oui celui avec le petit train là). Ha ! Là aussi il faut définir l’objectif. Nous voulons mettre tous ces cartons dans un bateau qui arrive jusqu’au port de Cotonou.
Commence alors une traversée de Paris et de la région du Perche sans précédent afin de réunir tous ces cartons dans un lieu-dit du département du 61, afin que Necotrans puisse les mettre dans un container direction Cotonou. J’avais pris le soin de les prévenir de notre entreprise pour préparer le départ en amont.
A Paris, outre les cartons que certains partenaires ont eu la gentillesse de faire livrer à domicile (environ une cinquantaine déjà), il a fallu en récupérer une quarantaine dans 4 endroits différents (Le Bourget, le 11ème, le 14ème et le 7ème arrondissement de Paris) avec une Fiat 500, les monter au 4ème étage (avec ascenseur quand même) d’un lieu non-dit du département du 75, les peser, les mesurer, les reconditionner pour certains et estimer un poids moyen de la centaine de cartons qui se trouvent dans ce lieu non-dit du 75.
Ha oui ! J’allais oublier la centaine de cartons des éditions de la Fondation que nous profitons de ramener et dont une partie se trouve au 7ème étage (toujours avec ascenseur) au bout d’un long couloir et qu’il faut aussi peser et mesurer.
Parallèlement à ça, notre transitaire attend le colisage (poids et volume de la marchandise à transporter) pour organiser l’enlèvement, (ne vous méprenez pas enlèvement dans ce cas n’a rien à voir avec un rapt d’enfants) de tous ces jolis petits cartons et les mettre sur la mer au plus tard fin juillet. Pour un départ fin juillet, il faut en fait communiquer ces données au plus tard le 5 juillet.
Après l’état des lieux de Paris, direction donc le 61 (train Corail de 09h06 à Montparnasse) pour un premier état des lieux de certaines commandes arrivées là-bas. Des centaines de livres arrivés par palettes (pas de besoin d’y toucher) et par courrier via le site Amazon ; donc dans des petites enveloppes cartonnées et qu’il faut ouvrir une par une. Résultat ; 7 cartons reconditionnés, pesés et mesurés par mes soins pour un total d’environ 15 kg par carton, et une cinquantaine déjà emballés, pesés et mesurés (ouf !). J’envoie une première liste de colisage à mon transitaire. Nous évaluons le volume à 16 mètres cube et le poids à 5 000 Kg.
Deuxième grosse étape, transporter les livres du 75 au 61 (environ 170 km, merci la France pour ces belles autoroutes). Plus le choix, nous devons appeler des déménageurs, je m’avoue vaincue je ne pourrai pas à moi seule, charger tous ces cartons dans un utilitaire. Mardi 9 juillet 8h, j’offre un café aux déménageurs, ils chargent et 2h30 plus tard je suis sur la route (et les déménageurs aussi) pour déposer tout ça dans le 61. Je fais un détour par Chartres pour récupérer (encore) des livres, et je reprends la route pour le lieu-dit tenu secret. Arrivée 13h30 les cartons sont au complet et déchargés, je peux déjeuner !
Lorsqu’on s’improvise déménageur, l’inconvénient c’est qu’il y a des choses auxquelles on ne pense pas tout de suite ! Comme par exemple le fait que les cartons doivent être remplis et pas à moitié. Ben oui, dans un souci de facilitation du travail des déménageurs, j’avais pris le soin de ne pas remplir trop les cartons pour pas que ça soit trop lourd. Détrompez-vous, il faut les remplir même si c’est très lourd car une fois empilés, s’ils ne sont pas pleins, ils s’affaissent avec risque d’abimer les livres. Nous voilà donc (j’avais recruté une main d’œuvre gratuite parmi mes amies pour m’aider) de nouveau en train de reconditionner des cartons et de jouer à Tetris pour que les livres rentrent dans les cartons sans s’abimer. Une centaine de cartons plus tard, nous reprenons la route direction Paris pour une arrivée autour de 21h.
Continuent pendant tout ce temps, les discussions avec le transitaire pour le devis, les modalités d’enlèvement, le colisage, les papiers à fournir, plus couramment appelés documentation (dans le domaine du transport international) ; liste de la marchandise, factures, attestation de dons, nombre de colis, nombres de palettes ET le devis pour le dédouanement de la marchandise au port de Cotonou. Nous avons du mal à avoir cette dernière information qui conditionne le devis final, ce qui retarde la date initialement prévue pour le 15 juillet. Je ne suis pas contente, les choses trainent et je repars le 17 juillet, tout doit être bouclé avant mon départ. Finalement, je comprends après que nous pouvons aussi faire appel à une autre société (que le transitaire) pour le dédouanement à Cotonou, ce qui simplifie donc la procédure pour le départ de la France. J’informe mon contact, Gaëlle à Necotrans. Entre temps, je demande quand même un devis à une autre société. On recommence, colisage, lieu d’enlèvement, devis….Et puis fort de cette nouvelle information, Gaëlle me propose le 19 juillet pour le chargement de la marchandise. Banco ! L’enlèvement aura lieu à cette date. Je remercie le concurrent et les oublie aussitôt !
Comme je ne suis toujours pas devenue une spécialiste du transport international, Gaëlle m’informe que le transporteur qui vient chercher la marchandise avec un gros (très gros) camion ne s’occupe pas du chargement. Je rappelle les déménageurs et leur demande de me mettre une équipe à disposition pour le vendredi 19 juillet. L’horaire reste à confirmer, ça dépendra de la tournée du transporteur.
Mardi 16 juillet, direction le 61 pour un ultime contrôle des cartons et la réception de la dernière grosse livraison, 2 palettes de cartons. Nous sommes obligés de défaire les palettes et de décharger les cartons un à un car impossible de décharger la palette telle quelle. L’opération recommence, déchargement, reconditionnement, scotchage (je ne l’ai pas mentionné mais ça va de soi), comptage des cartons ! D’autres commandes étant arrivées entre temps, le volume et le colisage augmentent, nous sommes plutôt proches maintenant des 6 000 KG et des 25 mètres cubes de volume. Petite panique, Gaëlle me dit "Lucille si le volume continue d’augmenter comme ça, ça va devenir compliqué" " Non non promis ça bouge plus, calculons large comme ça pas de mauvaises surprises". Ca passe !! Et dire qu’on devait rajouter 200 rouleaux de couvre-livres… ils viendront par avion ! Mardi 16 juillet 16h14 je reprends le train pour Paris en priant de n’avoir rien oublié de faire, car le vol AF 804 m’attend le lendemain à Roissy (que j’ai failli rater et dans lequel Air France n’a pas jugé utile de mettre mes bagages qui sont donc restés à Paris avec du fromage dedans et qui arrivent j’espère par le vol du jeudi).
Les dates sont calées, c’est le principal, mais il reste quelques détails à régler ; la documentation, l’heure précise d’enlèvement et les instructions à donner à la personne qui supervisera tout ça dans le 61, le service douanes du transitaire, on vérifie la documentation, tout est ok.
C’est chose faite. Le transporteur passera entre 13h et 13h30. Je demande donc aux déménageurs de venir à 12h pour qu’ils puissent commencer à mettre les cartons sur les palettes et les filmer en attendant le gros, très gros, camion. Necotrans m’a expressément demandé de séparer la commande passée auprés de notre ami Stéphane le libraire des autres commandes (oui parce qu’en fait cette commande est exonérée de TVA vu que la commande est destinée à l’export, mais pour qu’il justifie l’exonération de TVA il faut un document de la douane qui prouve que la marchandise n’est pas restée en France). C’est chose faite aussi, les instructions ont été respectées. Vendredi 19 juillet 14h15, le camion est parti avec tous les livres et moi j’ai une partie de mon esprit qui est libéré. Avec un petit sentiment de satisfaction tout de même d’avoir tenu des délais serrés et d’avoir été un peu efficace.
Pour que tout ça fonctionne, il me semble important de préciser, au cas où, vous lecteurs inspirés vous lanceriez dans une aventure similaire, que rien n’aurait fonctionné sans un vrai travail d’équipe efficace, réactif, fiable et attentif.
Rendez-vous à la fin du mois d’août pour le déchargement…
Lucille

Commentaires

  1. Belle aventure ! Merci pour ce récit assez vivace. Mais, seriez-vous intéressée par la création de mini-bibliothèques dans les écoles ou les collèges, les lycées volontaires?

    RépondreSupprimer
  2. voilà un bel exemple d'aventure humaine!

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire